L’Aïd-el-Kébir, la ' grande fête'
L’Aïd el-Kébir, dite ‘la fête du mouton’, est un événement religieux pour les musulmans qui marque la fin du pèlerinage à la Mecque (Hajj). Elle est moment de partage et de transmission d’un savoir-faire culinaire d’une génération à l’autre.
L’animal du sacrifice
Le mouton est l’animal sacrificiel de l’Aïd el-Kébir. Il fait référence à un épisode de la vie d’Ibrahim, qui, se soumettant à l’épreuve divine, accepte de sacrifier son fils unique, Ismaël. Au dernier moment, Dieu envoie l’ange Gabriel qui substitue un mouton à l’enfant. Cet épisode est commun aux trois religions monothéistes (christianisme, judaïsme et islam). Le mouton symbolise à la fois l’acte de générosité divine et le substitut du fils d’Ibrahim. Ainsi, l’animal occupe une place importante dans la vie familiale avant son immolation : on lui donne un nom, on le nourrit de restes, on le promène, on le bichonne. Ne faisant pas partie des piliers de l’islam, le sacrifice n’est pas une obligation religieuse. Il est un geste de générosité envers autrui, selon le dicton musulman : « De toute cette viande de mouton, il n’y a que ce que l’on donne qui profite : ce que l’on a mangé est avalé, ce que l’on a donné est profitable » (Brisebarre, 2007).
Tradition et partage culinaire
La tradition veut que ce soit le père de famille qui accomplisse le rituel sacrificiel du mouton lors de la fête d’Aïd el-Kébir. Une fois l’animal abattu selon les préceptes halal, il est cuisiné et partagé entre les convives. La consommation des différentes parties de l’animal suit un ordre précis. Le jour même, des brochettes de foie et de poumons enveloppés de crépine sont bouillies puis grillées au feu. Le deuxième jour, on dépèce le reste de l’animal. La tête, le plat le plus traditionnel, est souvent servie en méchoui. Traditionnellement, au Maghreb, le type de cuisson obéit à une division genrée des tâches : aux hommes la grillade sur des braséros exécutée à l’extérieur, et aux femmes le bouilli, accompli dans la cuisine, à l’intérieur de la maison familiale. En France, la législation interdit la consommation d’abats comme la tête, la rate, la moelle épinière. Aussi, les plus jeunes générations issues de familles migrantes, consommateurs de produits occidentaux, se détournent peu à peu de ce type de mets qu’ils ne trouvent pas à leur goût.
L'Aïd el-Kébir est un moment d'inclusion, de partage, et de don ; un tiers de la viande est offerte aux personnes pauvres et à celles qui mendient.
BENKHEIRA, Mohammed Hocine, 1999. Lier et séparer. Les fonctions rituelles de la viande dans le monde islamisé. L’Homme. 1999. Vol. 39, n° 152, pp. 89-114.
BRISEBARRE, Anne-Marie, 1989. La célébration de l’Ayd el-Kébir en France : les enjeux du Sacrifice. Archives de sciences sociales des religions. 1989. N° 68, pp. 9-25.
BRISEBARRE, Anne-Marie, 2007. Sacrifier pour l’Aïd El-Kébir en France. Texte exclusif OCHA [en ligne]. [Consulté le 22 septembre 2015]. Disponible à l’adresse : http://www.lemangeur-ocha.com
HAMES, Constant, 1998. Le sacrifice animal au regard des textes islamiques canoniques. Archives de sciences sociales des religions. 1998. N°101, pp. 5-25.